Chanson de Gayette et Oriour


Le samedi au soir finit la semaine :
Gayette et Oriour, soeurs germaines,
La main dans la main, vont se baigner à la fontaine.  
Le vent souffle et les rameaux tremblotent.
Que ceux qui s'entr'aiment s'endorment doucement!

Le jeune Gérard revient de la quintaine,
Il a le coup de foudre pour Gayette au bord de la fontaine :
Entre ses bras il la prend et doucement il l'étreint.  
Le vent souffle et les rameaux tremblotent.
Que ceux qui s'entr'aiment s'endorment doucement!

« Oriour, quand tu auras puisé de l'eau,
Retourne à la maison, tu connais bien la ville.
Je resterai avec Gérard, qui est amoureux de moi. »
Le vent souffle et les rameaux tremblotent.
Que ceux qui s'entr'aiment s'endorment doucement!

Oriour s'en va, pâle et déçue;
Des yeux elle pleure, du coeur elle soupire,
Parce que Gayette, sa soeur, ne revient  pas.  
Le vent souffle et les rameaux tremblotent.
Que ceux qui s'entr'aiment s'endorment doucement!

« Hélas! fait Oriour, comme je suis mal née!  
J'ai laissé ma soeur dans le vallon;
Le jeune Gérard l'emmène chez lui! »
Le vent souffle et les rameaux tremblotent.
Que ceux qui s'entr'aiment s'endorment doucement!

Le jeune Gérard et Gayette s'en sont allés,
Ils ont pris leur chemin droit vers la cité.  
Aussitôt arrivé, il l'épouse.
Le vent souffle et les rameaux tremblotent.
Que ceux qui s'entr'aiment s'endorment doucement!


Chanson de Gaieté et Oriour, chanson de toile, traduction J. Bescond

On appelle chansons de toile de courtes compositions poétiques datant du Moyen Age que les femmes chantaient en tissant la toile. Ces chansons, souvent anonymes, content ordinairement une aventure d'amour. Le refrain était sans doute repris en choeur par toutes les femmes.